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  • : OGM : environnement, santé et politique
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Introduction

Le propriétaire de ce site ne dit pas si les OGM c’est bien ou mal, s’il faut en manger ou pas. Il n'est payé ni par Monsanto, ni par Carrefour, ni par Greenpeace... (lire la suite).    

Ses analyses sur les biotechnologies ont été poursuivies sur le cadre idéologique plus large, celui de la postmodernité.

 

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L'auteur

Marcel Kuntz est biologiste, directeur de recherche au CNRS et enseignant à l’Université Grenoble-Alpes, ses seules sources de revenus. Ses analyses n'engagent pas ses employeurs.

 

Nouvel ouvrage:

De la déconstruction au wokisme. La science menacée.

Notes pour la Fondapol (téléchargeables)

Glyphosate, le bon grain et l'ivraie

 

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Autres ouvragescouv grand public :

OGM, la question politique

 

 

 Les OGM, l'environnement et la santé  

 

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6 février 2018 2 06 /02 /février /2018 15:12
N’attaquez pas les agences scientifiques dans un but politique

L'érosion de la confiance dans les agences de régulation n'améliorera pas la responsabilité démocratique, prévient Bernhard Url, Directeur exécutif de l'Autorité européenne de sécurité des aliments.

 

Tribune publiée par la revue Nature, le 24 janvier 2018, sous le titre "Don’t attack science agencies for political gain"

https://www.nature.com/articles/d41586-018-01071-9

Le travail de l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) consiste à évaluer ce qui pourrait rendre les aliments dangereux. C'est une tache suffisamment dure. C'est encore plus difficile lorsque l'agence est au centre d'un débat public qui va bien au-delà de la science.

C'est le cas des édulcorants artificiels, des organismes génétiquement modifiés (OGM) et du glyphosate, l'herbicide le plus utilisé au monde. Lorsque des questions sur les valeurs d'une société sont transmises à des agences scientifiques plutôt qu'à des élus, l'évaluation scientifique en souffre.

 

La controverse sur le glyphosate a commencé il y a deux ans et demi, lorsque l'EFSA et des experts désignés par les membres de l'Union européenne ont conclu que le produit était peu susceptible d'être cancérigène. Fin 2017, la Commission européenne a renouvelé une licence autorisant la vente de l'herbicide. La conclusion de l'EFSA contredisait celle du Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), qui avait classé le produit chimique comme étant «probablement cancérigène» quelques mois plus tôt, en apportant sa propre part de controverse.

 

Le fait que les agences aient abouti à des conclusions différentes n'est pas surprenant: chacune d'entre elles a pris en compte différents corps de preuves scientifiques et de méthodologies. D'autres évaluations indépendantes - menées par l'Agence européenne des produits chimiques et les organismes de réglementation des États-Unis, du Canada, du Japon et de l'Australie - étaient en accord avec l'EFSA. Un organe d'experts sur les résidus de pesticides a également été créé par l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture et l'Organisation mondiale de la santé.

 

Même ainsi, la divergence entre la conclusion de l'EFSA et celle du CIRC a été débattue par les législateurs de Bruxelles à Berlin et au-delà. Des traces de résidus de glyphosate dans la bière allemande ou les pâtes italiennes ont été signalées, mais les quantités observées de résidus d'herbicides ne présentent des risques que si une personne consomme environ 1 000 litres de bière ou le poids de son corps dans des pâtes sèches par jour.

 

Pourquoi une telle frénésie? Les agences qui estiment que les produits réglementés présentent un faible risque sont souvent accusées d'être sous l’influence indue de l'industrie. Nous, à l'EFSA, pensons que certains militants ne sont pas disposés à accepter les preuves que certaines substances réglementées sont sûres, et vantent de faibles études scientifiques alléguant le contraire. Les mêmes groupes ont applaudi l'EFSA pour des examens sur d'autres pesticides, tels que les néonicotinoïdes, jugés dangereux.

 

Il nous semble que certains militants contestent les évaluations scientifiques de la sécurité alimentaire dans un but politique. Leurs arguments méritent d'être exposés - mais ils sont du ressort des décideurs politiques.

 

Au cours des deux dernières années, l'EFSA a fait l'objet de multiples allégations au cours de son évaluation du glyphosate. Le plus pernicieux de ceux-ci est que l'agence aurait violé la bonne pratique scientifique en plagiant l'information de l'industrie. Il est vrai que le document en question, le Rapport d'évaluation du renouvellement produit par les autorités allemandes, comprend une section résumant la littérature toxicologique publiée qui contient du texte compilé par un comité d'une vingtaine de sociétés, dont le fabricant original de glyphosate, Monsanto. Mais il s'agit d'une pratique courante, et les groupes d'examen par les pairs de l'EFSA ont examiné de manière critique cet apport.

La partie du rapport présenté comme étant copiée de l'industrie met également en évidence des préoccupations au sujet des produits qui contiennent du glyphosate. En fait, elle a été utilisée pour étayer une recommandation de l'EFSA en novembre 2015 visant à évaluer plus avant la sécurité des produits phytopharmaceutiques contenant du glyphosate. Cette partie a été mise à la disposition du public pour commentaire en 2014, mais les plaintes au sujet de textes copiés ne sont arrivées que fin 2017, après que d'autres plaintes ont été soulevées concernant l'influence possible de Monsanto sur la littérature scientifique publiée.

 

Ainsi, lorsque les militants allèguent que l'EFSA n'a pas respecté le processus scientifique lors de l'évaluation du glyphosate, nous pensons qu'ils s'opposent en fait à d’autres problèmatiques: le rôle des pratiques agricoles modernes et des multinationales biotechnologiques dans notre approvisionnement alimentaire.

 

Une discussion sociétale plus large sur ces questions est essentielle, mais elle ne sera pas réalisée en faisant appel à la science réglementaire. C'est le rôle des politiciens de représenter les valeurs, les besoins et les attentes de leurs électeurs à travers des processus démocratiques. Cela ne relève pas de la responsabilité d'organisations telles que l'EFSA, qui ont été créées pour conseiller les décideurs politiques de l'UE sur des questions scientifiques.

 

Trois changements aideraient les représentants élus et les organismes de réglementation à faire leur propre travail. Premièrement, les questions sur les valeurs sociétales devraient être élaborées en amont et en dehors du travail scientifique. L'UE doit se doter d'un cadre juridique et réglementaire pour la production alimentaire qui rende compte de l'opinion des citoyens sur l'agriculture intensive, l'utilisation des pesticides, les organismes génétiquement modifiés et autres biotechnologies, et l'importance de la biodiversité. Cela fournira un forum pour un débat ouvert et honnête.

Deuxièmement, des directives réglementaires et juridiques devraient être élaborées pour régir la manière dont les organismes de réglementation interagissent avec l'industrie et gérer la transparence des données qu'ils utilisent.

 

Enfin, les politiciens doivent décider s'ils veulent que l'évaluation des risques des produits réglementés, comme le glyphosate et les additifs alimentaires, continue d'être fondée sur des études de sûreté commandées et payées par l'industrie, comme cela a été le cas depuis des décennies. Si c'est le cas, les politiciens doivent avoir le courage de soutenir les organismes de réglementation chargés de mettre en œuvre ces règles. Sinon, ils doivent trouver du financement pour ces études ailleurs. Ce n'est qu'une fois que ces mesures auront été prises que les organismes de réglementation seront à l'abri d'allégations de partialité lorsque leurs conclusions scientifiques sont en contradiction avec l'agenda politique d'un groupe d'intérêt ou un autre.

 

(traduction M. Kuntz)

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