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  • : OGM : environnement, santé et politique
  • : Actualité et faits scientifiques sur les OGM. Postmodernisme en science.
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Introduction

Le propriétaire de ce site ne dit pas si les OGM c’est bien ou mal, s’il faut en manger ou pas. Il n'est payé ni par Monsanto, ni par Carrefour, ni par Greenpeace... (lire la suite).    

Ses analyses sur les biotechnologies ont été poursuivies sur le cadre idéologique plus large, celui de la postmodernité.

 

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L'auteur

Marcel Kuntz est biologiste, directeur de recherche au CNRS et enseignant à l’Université Grenoble-Alpes, ses seules sources de revenus. Ses analyses n'engagent pas ses employeurs.

 

Nouvel ouvrage:

De la déconstruction au wokisme. La science menacée.

Notes pour la Fondapol (téléchargeables)

Glyphosate, le bon grain et l'ivraie

 

Précédent : L'affaire Séralini: l'impasse d'une science militante

Autres ouvragescouv grand public :

OGM, la question politique

 

 

 Les OGM, l'environnement et la santé  

 

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17 mars 2015 2 17 /03 /mars /2015 16:48

Dans la Lettre d'ATHENA (jan. fév. 2015), Alliance Nationale des Sciences Humaines et Sociales (instance de coordination des SHS), Sandra Laugier (membre du comité de pilotage de la Mission Interdisciplinarité du CNRS) s’exprime dans une interview :

« [Les SHS] sont au cœur de formidables formations universitaires et elles sont par tradition soutenues au CNRS, pour un ensemble de champs de recherche spécifiques, dont certains n’auraient jamais connu leur développement international sans ce soutien: par exemple l’archéologie, l’anthropologie, la philologie classique.... ».

 

Jusque-là, pas de problème. La suite commence à devenir plus inquiétante :

« les SHS apparaissent désormais toutes, et partout, en tant que source de transformation ».

 

Et en réponse à la question « Avez-vous le sentiment que les autres disciplines acceptent facilement ce nouveau positionnement des SHS ? », S. Laugier répond :

« C’est là que cela se complique ! Mais elles n’ont pas vraiment le choix » […] il reste encore aux SHS à conquérir une forme d’égalité, à faire comprendre que le point de vue du chercheur en SHS, sur l’environnement, les nanotechnologies ou la biologie synthétique par exemple, est tout aussi pertinent et valable que celui du chercheur en physique ou en biologie ».

 

Nous touchons là précisément au problème que posent certaines SHS :

- positionnement dans un rapport de pouvoir et non de complémentarité scientifique,

- irruption dans des disciplines dont elles ignorent et nient les lois et méthodes,

- volonté de s’imposer aux scientifiques qui n’auraient « pas vraiment le choix ».

 

Il devient urgent d’apprendre à décrypter ces chapelles qui n’englobent pas la totalité des SHS, mais qui tentent d’imposer leurs points de vue dans les champs de la recherche scientifique et technologique (en particulier publique).

 

 

I - Identification des Science and Technology Studies (STS)

 

Les pratiquants de cette « science humaine et sociale » très particulière  déclinent des idées toujours enracinées dans la même idéologie, dite postmoderne

La pensée postmoderne se définit comme une réaction contre la modernité. Le postmodernisme est ainsi un mouvement viscéralement anti-Lumières.

Lire le Dossier : où est l’héritage des Lumières ?

 

La pensée postmoderne, critique de la science, se caractérise par deux traits

- le constructivisme social c’est-à-dire l’hypothèse que le réel scientifique est sociologiquement construit par les chercheurs 

« …A l’évidence, l’émergence d’un fait [scientifique] résulte d’un processus social de construction qui se déroule à l’intérieur de la communauté scientifique. Tout le problème du chercheur consiste donc à faire émerger des faits, qui vont lui permettre d’obtenir une certaine reconnaissance, un certain crédit ». (Bruno Latour - Le métier de chercheur)

- le relativisme 

«Bien qu’on me mette souvent en garde contre le danger de «se noyer dans le relativisme», je prétends au contraire qu’on doit apprendre à y nager...». (Bruno Latour - Changer de société, refaire de la sociologie, p.37)

 

Parmi les sous-disciplines de la pensée postmoderne, on trouve les gender studies (à coté de travaux scientifiques qu'il n' y a pas lieu de critiquer ici, certains croient devoir justifier que "c'est de la science" en niant l'existence d'une idéologie du genre) et les science studies (aussi appelées science and technology studies ou STS) décryptées ici.

 

 

II - Quelques autres caractéristiques

 

1. Entre soi et hégémonisme

Cet « entre soi » est un excellent guide pour identifier les chapelles des SHS, notamment les STS. Dans l’écrasante majorité des cas, les personnes qui participent à un colloque organisé par les STS - ou à une de leur publication - appartiennent à la même chapelle (la transversalité ne semble pas concerner les SHS).

L’exemple de la collaboration entre STS et le Génopole : lors des 4 colloques successifs « Science de la vie en société » du Genopole, tous les orateurs invités du partenaire SHS (l’IFRIS), qu’ils soient sociologues, philosophes, historiens des sciences, provenaient du même courant.

 

2. Cadrage des travaux sur une base idéologique à laquelle on ne peut se soustraire si on souhaite publier, soutenir une thèse, obtenir un poste, etc.

Décryptage du livre « Plantes transgéniques : quelle évaluation éthique ? (qui fait suite à une thèse encadrée par Catherine Larrère).

 

3. Déconstruction de la science et jeux de mots

On peut citer ici, parmi d’autres, Brian Wynne (Professeur de « Science Studies » à l’Université de Lancaster) qui a théorisé, à propos de l’Autorité Européenne de Sécurité Alimentaire (EFSA), l’existence d’une « EFSA-science » et d’une « non-EFSA science ». Il s’agit de créer de toute pièce une « controverse, alors que bien sûr il n’y a qu’une seule science.

En réponse, lire : The postmodern assault on science.

 

4. Instrumentalisation de l’engouement pour les sciences

Ajout de l’adjectif « citoyennes » et détournement à des fins politiques d’une mission « Sciences Citoyennes » au CNRS.

 

5. Rejet de toute réponse critique des scientifiques, systématiquement qualifiés de « scientistes » (ou de positivistes) lorsqu’ils sont attachés au respect de la méthode scientifique et de la distinction entre le vrai et le faux.

Réponses: « Why the postmodern attitude towards science should be denounced »

 

 

III – Glossaire

 

Il suffit de quelques termes du vocabulaire STS pour permettre aux scientifiques, aux enseignants et à tous ceux qui le souhaitent, d’identifier cette idéologie.

 

Controverses : le processus qui relie la science, la technologie et la société peut se résumer à un paysage de controverses. D’où le programme de Bruno Latour à Sciences Po, intitulé « Mapping controversies ».

La controverse devient le moyen de dénigrer la science et, sur le plan sociétal, le moyen de positionner à égalité toutes les parties prenantes, qui deviennent aussi légitimes que les experts. Le relativisme est ainsi assuré.

En didactique des sciences, la controverse est également considérée comme un outil d’enseignement de la science par des didacticiens proches des STS :

Nombreux spécialistes STS considèrent que les controverses sont un outil de démocratie technique (voir ce terme).

 

Révélateur dans le livre de Callon, Lascoumes et Barthe (« Agir dans un monde incertain ») : « Il ne faut pas se contenter d’attendre que les controverses se déclarent. Il faut les aider à émerger, à se structurer, à s’organiser ».

 

Des sous-chapelles de la sociologie des controverses existent, qui développent par exemple des concepts comme la « balistique des controverses » de Francis Chateauraynaud. Ici aussi, ce qui est vrai ou faux n’est pas central, seuls comptent la controverse (ou le conflit) et les évolutions tactiques des acteurs. Voir à ce sujet.

 

 

Co-production de connaissances : tentative de certains sociologues de la connaissance pour défendre et justifier leur présence au sein même des laboratoires de recherche.

L’idée, développée entre autres dans les ouvrages de Michel Callon (Centre de Sociologie de l’Innovation de l’Ecole des Mines) est que les scientifiques ne possèderaient pas toutes les compétences pour « produire » une connaissance adéquate ; les experts des sciences humaines, mais aussi les « profanes » et leurs associations doivent pouvoir leur apporter une valeur ajoutée, en jouant qui plus est un rôle d’observateurs critiques sur les lieux de l’activité scientifique.

 

De nombreuses sous-chapelles de cette co-production des connaissances existent, en particulier une vaste activité de « sociologie des laboratoires ». Sous prétexte d’une analyse ethnographique des chercheurs, la sociologie prétend comprendre la manière dont émergent les concepts scientifiques, tous socialement construits suivant son cadre de pensée.

 

 

Deficit Model : concept en provenance des STS britanniques, en réaction critique à un rapport de la Royal Academy of Science publié en 1985, concernant le « public understanding of science ». La critique porte sur le fait que les auteurs du rapport donnent l’impression de penser – selon leurs contradicteurs - qu’il « suffit » que les scientifiques expliquent ce qu’ils font pour que la société se l’approprie avec enthousiasme.

Les adeptes des STS voient dans le déficit model et dans la prétendue demande d’ « acceptabilité » (des inventions des scientifiques) l’arrogance des scientifiques dont la supériorité supposée vient de ce qu’ils prétendent avoir un savoir que les autres n’ont pas. Les STS prônent donc des approches participatives (co-construction des technologies, etc.) dont on sait qu’elles ont échoué lorsqu’elles ont été mises en œuvre (Kuntz, Controverses autour de la transgénèse végétale : des visions du monde divergentes)

 

 

Démocratie technique : déclinaison « science et technologie » de la démocratie participative. A distinguer soigneusement de la démocratie locale (qui n’est pas incompatible avec la démocratie représentative).

La démocratie technique consiste à organiser l’implication d’une soi-disant « société civile » dans les choix de politiques scientifiques ainsi que dans les activités scientifiques et techniques. La société civile peut être représentée par des citoyens (cf. conférences de citoyens), mais dans les faits elle est prioritairement représentée par ceux qui s’autoproclament leurs représentants, c.à.d. principalement des associations/organisations critiques de la science, se définissant comme « parties prenantes » (voir ce terme) ou comme « lanceurs d’alerte ».

 

« Contrairement à une conviction largement répandue, il se pourrait que, tout compte fait, la science ne soit pas un bien public dont la production améliore la prospérité collective, mais un malheur public dont les effets néfastes doivent être contenus à tout prix » (M. Callon).

 

 

Experts/profanes : par cette séparation il s’agit d’affirmer que certains – les experts - « prétendent » posséder un savoir supérieur (une compétence), et que l’expertise devrait s’étendre à l’ensemble des « citoyens ». Le but des forums et de la démocratie technique est donc de permettre aux différents avis de s’exprimer, puisqu’ils se valent tous (une compétence de plusieurs dizaines d’années d’un scientifique ne vaudra pas plus qu’une opinion d’un « citoyen »).

 

« … à l’heure où l’on évoque de plus en plus la notion de « démocratie technique », le traitement symétrique des savoirs experts et des savoirs profanes apparaît comme l’un des moyens de lui donner une forme concrète » (Yannick Barthe).

 

 

Forums hybrides, conférences de citoyens, jury citoyen : outils de débat à vocation de « public engagement in science ». Leur niveau de civilité varie selon les pays. Dans de nombreux modèles, ils constituent un véritable procès de la science.

 

Pour Corinne Lepage (écologiste politique, avocate spécialisée dans l’environnement), « il est essentiel pour les décideurs d'avoir accès à une expertise impartiale et d'envisager tous les arguments sur tous leurs angles. Des procédures d'enquêtes approfondies devraient être systématiquement organisées pour récolter tous les avis, comme dans une salle d'audience ».

 

Cependant, « comme la querelle sur les OGM l’a montré, les scientifiques ne seront jamais en mesure de gagner lors de débats de type « salle d’audience » d’une cour de justice : manifestement, si toutes les « constructions sociales » de la science sont égales, certaines le sont plus que d'autres » (Kuntz, le postmodernisme contre la science, Revue Commentaire automne 2014).

 

 

Midstream Technological Assessment/Modulation : le concept par lequel les STS prétendent procéder à l’évaluation des technologies innovantes au sein même des laboratoires, le plus en amont possible. Il ne s’agit pas ici de faire en sorte que cette évaluation soit réalisée par des organes officiels (comme la CNIL ou le Comité scientifique du Haut Conseil des Biotechnologies), mais qu’elle soit opérée par des sociologues/anthropologues « de terrain ». Cela permet aux STS de se positionner « au-dessus » des chercheurs en termes de valeurs morales et sociétales.

 

 

Parties prenantes ou Stakeholders : dans le cadre d’un débat ou d’une controverse « sociotechnique » l’ensemble de tous ceux qui se considèrent concernés. Les parties prenantes sont donc les chercheurs et les industriels, auxquels il convient d’ajouter le « public », mais comme celui-ci n’a généralement pas le temps, ni la motivation, ce sera ceux qui ont décidé de parler en son nom, c’est-à-dire des associations/organisations qui promeuvent le débat comme une fin en soi ou pour imposer une interdiction. Il est très rarement fait état des élus comme faisant partie des « parties prenantes », puisqu’il s’agit de supplanter la démocratie représentative.

Voir à ce sujet : Nathalie Berny - Le lobbying des ONG internationales d’environnement à Bruxelles

 

Sur le rôle des citoyens dans les choix scientifiques, voir cette pièce de Pierre-Benoit Joly et Arie Rip qui considèrent en 2007 que l’expérience de sociologie postmoderne appliquée, mise en oeuvre à l’INRA de Colmar, est « highly productive », alors qu’elle s’est avérée 3 ans plus tard un fiasco complet.

Voir aussi une lettre de lecteur suite à l’article de Joly et Rip.

 

 

Technoscience : le mot a été inventé par un philosophe belge, Gilbert Hottois, pour signifier cet aspect de la recherche où les composantes scientifiques et techniques sont étroitement imbriquées. Il est devenu synonyme d’une sorte de machine « technoscientifique » emballée, sur laquelle plus personne n’aurait de maîtrise. Ce terme est donc souvent utilisé d’une manière critique à l’égard de la science et de la technologie, comme dans le titre de l’ouvrage de Bernadette Bensaude-Vincent « Les vertiges de la technoscience ». Souvent aussi, y compris chez Hottois, on retrouve la confusion entre « technologie » et « technocratie ». 

 

 

Production de connaissances : cette expression a remplacé le mot « recherche » dans de nombreux contextes. La notion de « production » est ici d’origine marxiste, mais elle a pris une tournure économique néo-libérale (voir à ce sujet l’ouvrage de Gibbons et al. The new Production of knowledge). Dans la pensée postmoderne, le terme annonce la déconstruction de l’universalité de la science (appelé « Mode 1 ») ; pour les auteurs de cet ouvrage, le futur appartiendrait à un « Mode 2 » où la science deviendrait une activité locale prenant en compte les diversités culturelles.

 

 

Risque : notion qui provient du monde de l’assurance et qui a été portée dans le domaine des SHS principalement par l’ouvrage d’Ulrich Beck « La Société du Risque ». L’idée est que nous vivons dans une société qui n’arrête pas de subir les nombreux risques engendrés par la science et la technologie (amiante, vache folle, nucléaire, etc.). L’ouvrage de Beck traite principalement de risques industriels allemands, mais la généralisation a été faite vers l’ensemble des « crises » dont l’origine serait la science et la technologie.

Dans cette optique, le risque est toujours considéré en soi, indépendamment du bénéfice. Dans « Le principe Responsabilité » Hans Jonas prône ce qu’il appelle l’heuristique de la peur pour enseigner aux citoyens la crainte du risque.

Les SHS postmodernes se nourrissent de « risques » qui sont souvent politiquement construits par l’écologie politique - qui impose l’idée que « la planète » serait menacée et s’arroge le magistère moral de la sauver.

 

« L’écologie politique marque l’âge d’or des sciences sociales enfin délivrées du modernisme ». (Latour - Politiques de la nature, comment faire entrer les sciences en démocratie)

 

 

Pour finir de manière ludique !

QUIZ : combien de ces termes se trouvent dans ce projet de l’Institut Francilien Recherche Innovation Société (IFRIS) ?

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17 octobre 2014 5 17 /10 /octobre /2014 17:16

10 questions BlBNote de lecture de

10 questions à Bernard Le Buanec sur les OGM

(Académie des technologies), EDP sciences, 2014, 65 pages, 14 euros

Dans la collection « 10 questions à… », Bernard le Buanec, agronome, biologiste végétal et auteur de nombreux ouvrages, nous propose un ouvrage concis (44 pages de texte) d’une clarté et précision remarquables. Il s’agit là d’une indispensable introduction à la question des OGM pour quiconque, non spécialiste, souhaite obtenir des réponses objectives aux diverses questions de ce débat.

 

D’un ton neutre et sans polémique, l’auteur explique ce qu’est un OGM, quelles sont leurs utilisations dans le monde, leurs effets sur l’environnement, sur la santé, leurs impacts économiques. L’ouvrage aborde également la question sensible de la propriété intellectuelle que l’auteur connaît particulièrement bien : il explique que les OGM ne sont pas stériles et pourquoi, dans la réglementation en vigueur en Europe, l’étendue de la protection d’une variété génétiquement modifiée est quasi identique à celle d’une variété conventionnelle, pour l’agriculteur comme pour l’obtenteur. Ne sont pas oubliées non plus les questions du libre choix, tant pour le consommateur que pour l’agriculteur. L’ouvrage dépeint aussi un panorama des recherches en cours pour répondre aux défis quantitatifs et qualitatifs de la production alimentaire. L’ouvrage contient un glossaire et des références pour approfondir les questions abordées.

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16 septembre 2014 2 16 /09 /septembre /2014 15:47

couvMon dernier livre est maintenant disponible en format Kindle !

 

Sites de ventes en ligne et notes de lecture : ici

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7 juin 2014 6 07 /06 /juin /2014 09:06

Derrière ce titre provocateur est posée une question légitime, celle du bilan de l’activisme environnementaliste, entre contre-pouvoir, prises de conscience et réactions salutaires face à notre impact sur l’environnement et, d’autre part, un projet politique -voire un intégrisme- peu soucieux des faits scientifiques, incapables d’adopter des positions nuancées.

                                                                            Lire le Tome 2 : Le lobbying anti-Riz Doré

 

TOME 1 : Le lobbying anti-DDT, un dossier noir de l’écologisme ?

 

Jean Brissonnet a publié en décembre 2003 dans la revue de l’AFIS un article intitulé « Désinformation, paludisme et DDT. Selon que vous serez puissants ou misérables » 

qui présente le contexte de la lutte contre la malaria, l’apport du DDT comme insecticide contre le moustique vecteur de la maladie, et le tournant en 1962 lorsque paraît le livre à charge Le Printemps silencieux de l’écrivain Rachel Carson : « les milieux politiques sont interpellés et les industriels de la chimie mis en accusation ». Sous la conduite de son administrateur, William Ruckelshaus, l'Agence pour la protection de l'environnement (EPA) américaine interdit le DDT en 1972. Ruckelshaus est souvent accusé d’être un militant écologiste. D’un autre coté, l’usage agricole du DDT aux Etats-Unis était sans doute déraisonnable.

Redonnons la parole à J. Brissonnet : « Plus de fabrication, plus d’exportation et surtout plus de financement pour la lutte antipaludéenne, si elle inclut l’usage du DDT. Les pays pauvres qui manquent des moyens indispensables doivent cesser le combat. Pire, ils se voient menacés en cas de « désobéissance » du blocage de leurs exportations ». Sont cités les cas de l’Inde, du Sri Lanka et de l’Azerbaïdjan.

En avril 2014, le magazine de l’AFIS fait sa une sur « DDT et paludisme, une précaution mortelle », avec un dossier signé Jean-Paul Krivine (« DDT et lutte contre le paludisme : la réécriture de l’histoire »), et enfonce le clou : « Certaines associations écologistes ne veulent pas le reconnaître. Certains journalistes comme Stéphane Foucart voudraient le nier. Mais la réalité est là : les campagnes anti-DDT ont conduit à la disparition progressive du DDT dans la lutte contre le paludisme, avec des conséquences sanitaires majeures (des millions de victimes) ».

 

Un journaliste militant écologiste monte au créneau

S. Foucart, journaliste au Monde, réagit en parlant de « la fable de l'interdiction de l'insecticide DDT par les écologistes » (Le Monde, 25 avril 2014). Pour lui, « elle a été fabriquée de toutes pièces, dans les années 1990, dans les cercles néoconservateurs américains, sous la volonté et l'impulsion d'industriels emmenés par Philip Morris ».

Un brin complotiste, il écrit que l’AFIS agit pour « d'obscures raisons ». Plus intéressant dans cet article est la citation de George Monbiot (un célèbre militant écologiste) : « le DDT n'est pas interdit à des fins de lutte contre le paludismeL'interdiction mondiale du DDT ne concerne que ses usages agricoles et l'une des raisons à cela est d'assurer que les moustiques ne deviennent pas résistants à cette substance ».

 

On notera que Foucart était déjà monté au créneau dans Le Monde du 5 novembre 2011 (« Haro sur les écolos! ») en réaction au livre de Bruno Tertrais (L’Apocalypse n’est pas pour demain , Denoël, 2011), pour défendre l’action des écologistes dans le dossier du DDT.

A la suite du droit de réponse de B. Tertrais, Foucart réagit à nouveau, puis encore trois fois ! (lire 2, 3, 4), signe manifeste que le dossier est encombrant pour l’écologie politique…

 

Les termes du débat sont donc posés

Des écologistes nient toute responsabilité dans l’abandon du DDT dans la lutte antimalarienne, alors que d’autres avancent « une moyenne de deux millions de morts annuelles qui auraient pu être évitées » et ne l’ont pas été à cause des campagnes des organisations écologistes.

Brissonnet lui évoque, outre « les intégristes de l’écologie », « l’industrie chimique, [pour qui] les produits de remplacement sont une source de revenus importants », « l’industrie pharmaceutique, qui fournit les médicaments antipaludéens », ainsi que « les malthusianistes » souhaitant la réduction du nombre d’humains.

Pour le site Agriculture & Environnement : « les écologistes – et d’autres, comme l’Usaid – ont une part considérable de responsabilité dans la diminution progressive de l’usage du DDT dans les pays qui combattent le paludisme ».

 

Il y a donc à l’évidence nécessité de mettre toutes les données sur la table, afin de permettre aux historiens de trancher différentes questions cruciales :

-quelles ont été les motivations exactes de William Ruckelshaus pour imposer l’interdiction du DDT aux Etats-Unis ? Pourquoi n’a-t-il pas suivi le rapport Sweeney qui avait auditionné 125 experts ?

Il aurait reconnu en 1979 que « la décision était politique plutôt que scientifique ».

-quelles répercussions de cette interdiction aux Etats-Unis sur les programmes internationaux de lutte contre le paludisme ?

-quel rôle dans l’abandon du DDT a joué l’apparition de résistances à cet insecticide chez les moustiques vecteurs ? Une analyse de la littérature scientifique et de certaines bases de données estime que ces problèmes « techniques » (tous produits confondus) sont impliqués dans 32% des cas recensés de résurgence de la malaria.

-Les organisations écologistes ont-elles effectivement activement poussé à l’interdiction TOTALE du DDT, sans distinction de son usage ?

 

Quelques autres acteurs/témoins clés

Charles Wurster (chief scientist de l’Environmental Defense Fund, EDF, une organisation écologiste). Ses publications controversées ont contribué à la promotion des études sur les organismes non-cibles. En 1965, il avait publié une étude concluant à la disparition de 70% d’une population d’oiseaux (sur la base d’une population limitée à 12 individus…). En 1968, sa publication dans Science (sur l’impact du DDT sur des algues marines) avait été utilisée dans une campagne sur la « mort des océans » dont allait être responsable le DDT.

Lire une critique par Thomas Jukes

Sur l’oeuvre de Jukes, lire.

Sur l’opposition entre Wurster et Jukes, lire aussi Elena Conis.

et sur d’autres résultats scientifiques controversés, lire Robert Zubrin.

 

Donald R. Roberts et Richard Tren. Ils sont auteurs du livre The excellent powder. DDT’s political and scientific history (Dog Ear Publishing, 2010) et d’articles comme:

R. Tren, K. Hess & D. Roberts. Put DDT residues and human health in perspective. Chemosphere, Mar 2012.

R. Tren, R. Nchabi Kamwi, A. Attaran. The UN is premature in trying to ban DDT for malaria control. BMJ 2012; 345:e6801

 

Roberts et Tren dénoncent (voir par exemple : International advocacy against DDT and other public health insecticides for malaria control. Research and Reports in Tropical Medicine 2011:2 23–30) les organismes internationaux qui s’opposent à l’utilisation d’insecticides comme le DDT dans l’intérêt de la santé publique. Ils citent le Programme des Nations Unies pour l'environnement (UNEP), le Secrétariat de la Convention de Stockholm (cet accord international interdisant certains polluants organiques persistants signé en 2001 est entré en vigueur en 2004) et le Fonds pour l'environnement mondial(GEF). Pour eux, en dépit de financements généreux, guidés par un agenda idéologique, il n’y a pas aujourd’hui d’alternative efficace et bon marché comparable au DDT.

 

H. Bouwman. Expert pour la Convention de Stockholm et l’OMS, auteur d’études sur l’impact du DDT, il se présente comme un “centriste” sur cette question, parlant de « paradoxe » entre les avantages et les inconvénients :
H Bouwman, H van den Berg, and H Kylin.
DDT and malaria prevention: addressing the paradox. Environ Health Perspect, June 1, 2011; 119(6): 744-7.

Les critiques de R. Tren et D. Roberts

et la réponse des auteurs.

 

J. Gordon Edwards, professeur émérite d'entomologie de l'université de Californie à San José et membre très ancien du Sierra Club et de la Société Audubon. Lire de larges extraits de son article paru dans le magazine Fusion n°48 de novembre-décembre 1993.

 

Des malthusianistes, dont les déclarations sont rappelées par le site Agriculture & Environnement : Gaylord Nelson, Garett Hardin et Paul Ehrlich.

 

En complément : d’autres livres et articles

Paul Driessen. Eco-Imperialism: Green Power - Black Death (2005)

Thomas R. Dunlap & William Cronon. DDT, Silent Spring, and the Rise of Environmentalism: Classic Texts (2008)

H. van den Berg. Global status of DDT and its alternatives for use in vector control to prevent disease. Environ Health Perspect. Nov 2009; 117(11): 1656–1663

David Kinkela. DDT and the American Century: Global Health, Environmental Politics, and the Pesticide That Changed the World. The American Historical Review (2012) 117 (5): 1619-1620
W.M Jarman & K Ballschmiter.From coal to DDT: the history of the development of the pesticide DDT from synthetic dyes till Silent Spring.
Endeavour,November 20, 2012

 

Le rôle des écologistes politiques

Tous les arguments contre les écologistes ne sont pas recevables. Ainsi le film à charge de Rutledge Taylor, 3 Billion and Counting, fut critiqué par Amir Attaran qui par ailleurs défend le DDT.

Dans un article du New York Times en date du 8 janvier 2005, interrogés par son auteur Nicholas Kristof, le porte-parole du WWF Richard Liroff affirme que si les alternatives au DDT ne marchent pas, comme ce fut le cas en Afrique du Sud, alors il faut utiliser le DDT. Le porte-parole de Greenpeace acquiesça.

D’un autre coté, Katie Lewis dans son article « DDT stalemate stymies malaria control initiative » (CMAJ. Nov 4, 2008; 179(10): 999–1000) rapporte qu’en Ouganda, en avril 2008, après le début d’une campagne gouvernementale de traitement au DDT, des commerçants, des exportateurs et des écologistes (qui ne sont pas nommés) ont porté plainte et réussi à arrêter les traitements. Evènement anecdotique ou composant d’une stratégie de lobbying organisé ?

 

Des documents clés

Pour mettre sur la table des faits, la suite de ce présent article cite des documents tirés des sites web de l’organisation Beyond Pesticides, de Greenpeace, de l’International POP Elimination Network (IPEN), du Pesticide Action Network (PAN) et du WWF; documents pour la plupart aujourd’hui retirés de ces sites, mais qui ont été enregistrés et qui peuvent être dans leur intégralité mis à la disposition des historiens.

 

Beyond Pesticides

25 avril 2007, opposition affirmée contre la réintroduction du DDT contre la malaria et annonce que 59 organisations ont signé une déclaration intitulée « Preventing Malaria and Promoting Health Solutions to Malaria Beyond DDT ».

 

Greenpeace

Rapport annuel 1999 : à propos de sa campagne en Inde, en argumentant sur Bhopal, Greenpeace justifie son action de lobbying « contre les projets de l’industrie d’exclure le DDT des programmes d’élimination des POP » (polluants organiques persistants).

11 septembre 1999, lors des négociations pré-Convention de Stockholm, un communiqué se félicite qu’une majorité de pays se soient déclarés en faveur d’une élimination de « produits chimiques super-toxiques comme le DDT, les PCB et les dioxines ».

Greenpeace Toxic Site (2001) explique ce que sont les POP et réaffirme que le DDT a un impact sur la vie sauvage et la santé. Aucune distinction quant à l’usage du DDT n’est mentionnée dans ces documents.

 

IPEN (qui regroupe 260 ONG)

Dans le cadre des débats de la Convention de Stockholm (2001), le réseau écologiste demande l’interdiction de tous les POP, qui inclut le DDT. Aucune distinction quant à l’usage du DDT n’est mentionnée.

 

PAN

4 décembre 2000, demande d’un « global ban on the production and use of 12 of the worst of these chemicals, including DDT » (dans ce document le PAN rappelle que le DDT est interdit aux Etats-Unis depuis 1972).

28 septembre 2001, demande explicite d’« alternatives to DDT use of control of malaria and other diseases ».

28 septembre 2006, le porte-parole parle de « scandale » à propos du soutien de l’OMS à la réintroduction du DDT pour contrôler la malaria. A noter qu’en juillet 2006, le PAN affirmait que les pays qui veulent utiliser le DDT peuvent le faire, tout en clouant au pilori des personnes ou organisations supposées promouvoir le DDT.

3 mai 2007, communiqué triomphal suite à une déclaration d’un représentant de l’OMS (Dakar) en faveur de la réduction de l’usage du DDT (lorsque cela est possible).

 

WWF

30 juin 1998, dans un communiqué, il demande la suppression progressive et l’abandon final du DDT pour 2007, y compris contre la malaria.

2000, Claude Martin, Directeur général du WWF, attaque le DDT et affirme : « the continued use of DDT is a classical exemple of an inappropriate technological solution ». Il ne doit être utilisé qu’en recours ultime selon lui.

 

En résumé

Ces documents l’attestent : les organisations écologistes ont formé un large front de lobbying contre le DDT, en ne distinguant que rarement son usage agricole et de celui de la prévention de la malaria.

Il n’a pas pu être mis en évidence que ces organisations, suivant la citation de Montbiot dans le Monde du 25 avril 2014, souhaitait simplement éviter « que les moustiques ne deviennent résistants à cette substance ».

Les historiens devront établir quelle part exacte incombe à ce lobbying dans les décisions d’abandonner l’utilisation du DDT contre la malaria. Ou de ne pas redémarrer de nouveaux programmes lorsque les précédents ont été arrêtés (pour des causes qui peuvent être diverses, financières, politiques ou techniques).

 

Marcel Kuntz (dernier ouvrage : les OGM, la question politique)

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6 février 2014 4 06 /02 /février /2014 10:29

couvMon nouveau livre

aux Presses Universitaires de Grenoble

 

PRESENTATION

Les organismes génétiquement modifiés (OGM) vont-ils réaliser des miracles pour nourrir la planète, ou aboutir à un désastre ? Scientifiquement la question ne se pose pas ainsi, car les OGM sont évalués cas par cas. Mais le dossier n'est-il pas avant tout politique ?

Il faudrait, entend-on évaluer davantage les OGM. Cependant, il n'existe actuellement aucune culture transgénique en France, et la recherche sur les OGM y est aujourd'hui impossible. Pourquoi un tel paradoxe ?

Qu'en est-il de la brevetabilité ? La coexistence entre les cultures d’OGM et les autres est-elle possible ? Quelle est la place du chercheur dans un tel contexte ?

Après plus de quinze ans de polémiques, il n'y a plus de doute : la querelle des OGM est bien politique.

La science est-elle dévoyée par cette politisation du débat ? L'interférence du politique a-t-elle des effets sur la science ? Quel rôle jouent les médias, et notamment les plus militants ? L'usage de la violence contre des expérimentations scientifiques est-il un moyen d'expression politique acceptable ?

Mon ouvrage fait apparaître les points cruciaux soulevés par la problématique OGM depuis ses débuts, et dresse un portrait de ses soubassements politiques.

 

Quelques sites de vente en ligne:

LibrairieDurance       Furet.com      LaLibrairie.com      DECITRE     FNAC     AMAZON

Sauramps        Payot (Suisse)  et dans toutes les bonnes librairies.

Les blogs les plus réactifs:

Imposteurs       Sectes-et-Pseudosciences      processalimentaire     PenséeUnique     Food      Lecolocritique     Initiatives Biotechnologies Végétales

Notes de lecture:        AFIS       Enquête&Débat      Fondapol

La presse en parle:  L’Opinion 18 février 2014     Le Parisien 19 février 2014       Enviscope 23 février 2014
Agriculteurs de France avril 2014       Valeurs Actuelles 15 mai 2014       Sciences & Avenir 24 juin 2014
Atlantico      LaTribune 25 juillet 2014

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7 janvier 2013 1 07 /01 /janvier /2013 16:48

uk-flagWhy it is time to simply say "No"

Dr. Jens Katzek

As a former Friends of the Earth campaigner against genetically modified food, I finally left in the mids of the 90th after almost 10 years the environmental organization I previously worked for because of their opposition to Golden Rice. And the more I follow the most recent debates on Golden Rice the more I am still convinced that this was a very good decision.

 

drapeau francaisPourquoi il est simplement temps de dire "Non" 

Dr. Jens Katzek

Je suis un ancien militant anti-OGM de Friends of the Earth et j’ai finalement quitté au milieu des années 90 cette organisation pour laquelle j’ai travaillé pendant près de 10 ans, en raison de son opposition au Riz Doré. Et plus je suis le récent débat sur le Riz doré, et plus je suis convaincu que c’était une très bonne décision.

 


uk-flagLecture to Oxford Farming Conference, 3 January 2013

Mark Lynas

To read the original version, click here

 

drapeau francaisConférence à l’Oxford Farming Conference, le 3 janvier 2013

Mark Lynas

Pour lire le texte intégral en Français, cliquer ici

Extraits:

J’aimerais commencer par des excuses. Pour mémoire, je le dis ici devant vous, je regrette d’avoir passé plusieurs années à arracher des cultures OGM.

Je suis également désolé d’avoir aidé le mouvement anti-OGM à démarrer au milieu des années 90, et d’avoir ainsi contribué à diaboliser un outil technologique important qui peut être utilisé au bénéfice de l’environnement.

En tant que défenseur de l’environnement, et en tant que personne qui croit que chacun dans ce monde a le droit de choisir une nourriture saine et nourrissante, je n’aurais pu choisir une voie plus contreproductive. Je le regrette à présent amèrement.

 

[…] j’ai découvert la science, et dans cette démarche, j’espère être devenu un meilleur écologiste. […]

C’était un mouvement (anti-OGM) explicitement anti-science.  […]

Ce que nous ne réalisions pas à l’époque, c’était que le véritable monstre de Frankenstein n’était pas la technologie OGM, mais notre réaction à son encontre.

[…] une critique me disait : « donc vous êtes opposé aux OGM du fait qu’ils sont mis sur le marché par de grandes sociétés. Etes-vous aussi opposé à la roue parce qu’elle est vendue par de grandes entreprises automobiles ?

Alors j’ai lu. Et j’ai découvert que chacune de mes intimes convictions n’était rien moins que des légendes urbaines écolos.

 

J’avais supposé que ça augmentait l’utilisation des produits phytos.  Il s’est avéré que le coton et le maïs résistant aux insectes ont besoin de moins d’insecticides.  J’avais supposé que les OGM profitaient seulement aux grandes entreprises. Il s’est avéré que des milliards de dollars de bénéfice sont revenus aux agriculteurs, ayant moins besoin d’intrants. J’avais supposé que la technologie Terminator dérobait aux agriculteurs le droit de garder les semences. Il s’est avéré que c’était le cas des hybrides depuis bien longtemps, et que Terminator n’a jamais eu lieu. J’avais supposé que personne ne voulait des OGM.  En fait, ce qui s’est passé, c’est que le coton Bt a été piraté en Inde et le soja Roundup Ready au Brésil tellement les agriculteurs avaient hâte de les utiliser. J’avais supposé que les OGM étaient dangereux. En fait, la technologie s’est avérée plus sûre et plus précise que la sélection variétale classique.  

  

[…] Il nous faut produire plus de nourriture, non seulement pour rester au niveau de la croissance de la population mondiale, mais aussi parce que la pauvreté est peu à peu éradiquée. […] L’intensification est essentielle – nous devons produire plus sur des surfaces limitées pour protéger les forêts tropicales et pour éviter que les habitats naturels existant soient labourés.  […] Nous devons également faire avec des quantités d’eau limitées, avec des aquifères qui s’épuisent et des sécheresses qui devraient sévir avec de plus en plus d’intensité. […] Nous devons aussi mieux gérer l’utilisation de l’azote.

 

[…] Il ne suffit pas de s’asseoir en attendant qu’une innovation technologique résolve nos problèmes. Nous devons être bien plus proactifs et stratégiques que cela. Nous devons nous assurer que l’innovation technologique bouge bien plus rapidement, et dans la bonne direction de ceux qui en ont le plus besoin.

 

[…] Avant sa mort en 2009, Norman Borlaug a consacré de nombreuses années à lutter contre ceux qui, pour des raisons idéologiques ou politiques, s’opposaient aux innovations modernes dans l’agriculture. Citons-le : « si les réfractaires arrivent à stopper les biotechnologies agricoles, ils pourraient en fait accélérer les famines et la crise de la biodiversité mondiale qu’ils avaient prédites depuis près de 40 ans ».

Et grâce à des campagnes soi-disant écologistes lancées par des pays riches, nous sommes dangereusement proches de ces positions à l’heure actuelle. Les biotechnologies n’ont pas été stoppées, mais leur coût a été rendu prohibitif pour tous sauf pour les entreprises de plus grosse taille. […] Il y a une ironie déprimante dans le fait que ceux qui conduisent des campagnes contre les OGM commercialisés par les grandes sociétés sont finalement ceux qui ont principalement contribué à cette situation.

 

[…] Nous, consommateurs bien nourris, sommes aveuglés par la nostalgie romantique de l’agriculture du passé. Parce que nous avons assez à manger, nous pouvons nous permettre de céder à nos illusions.

[…] Si vous y réfléchissez, le mouvement du bio est avant tout un mouvement de rejet. Il n'accepte pas les nombreuses technologies modernes par principe.

 

[…] à l’échelle de la planète, combien de terres ont été épargnées grâce à ces améliorations de rendement formidables, dans lesquelles les intrants chimiques ont joué un rôle déterminant?  La réponse est de 3 milliards d'hectares, soit l'équivalent de deux Amériques du Sud. Il n'y aurait plus de forêt amazonienne aujourd'hui sans cette amélioration des rendements. Ni resterait-il un tigre en Inde ou un orang outan en Indonésie. C'est pourquoi je ne sais pas pourquoi tant de ceux qui s'opposent à l'utilisation de la technologie dans l'agriculture se disent écologistes.

 

[…] Si vous regardez la situation, sans préjugés, une grande partie du débat, à la fois en termes de lutte contre les biotechnologies et en faveur du bio, est simplement basée sur un sophisme naturaliste - la croyance que le naturel est bon et que l’artificiel est mauvais. C'est une erreur, car il y a beaucoup de poisons et des façons de mourir entièrement naturels.

 

[…] Ainsi, les droits d'une minorité bien nantis, qui dérivent en fin de compte d’une préférence des consommateurs basée sur l'esthétique, éclipsent les droits de tout le monde à utiliser des cultures améliorées qui profitent à l'environnement.

Je suis pour un monde de diversité, mais cela signifie qu’un système d'exploitation ne peut pas prétendre avoir le monopole de la vertu et viser à exclure toutes les autres options. Pourquoi ne pouvons-nous pas avoir une coexistence pacifique? Particulièrement quand cela nous lie à d'anciennes technologies qui portent davantage de risques que les nouvelles.

 

[…] Le plus grand risque est que nous ne profitions pas de toutes sortes de possibilités d'innovation en raison de ce qui est en réalité rien de plus que des préjugés aveugles.

 

[…] Je ne sais pas pour vous, mais moi j'en ai assez. Donc, ma conclusion aujourd'hui est très claire : le débat sur les OGM est terminé. Il est fini. Nous n'avons plus besoin de discuter si oui ou non ils sont sûrs après plus d'une décennie et demie et la consommation de 3 billions de repas contenant des OGM, il n'y a jamais eu un seul cas de préjudice validé. […] Plus précisément, des gens sont morts pour avoir choisi de manger bio, mais personne n'a succombé de manger des OGM.

 

[…] Ainsi une innovation agricole hautement nécessaire est étranglée par une avalanche suffocante de règlements qui ne sont pas fondés sur une évaluation scientifique rationnelle du risque. Le risque aujourd'hui n'est pas que quiconque puisse être lésés par les aliments génétiquement modifiés, mais que des millions seront lésés de ne pas avoir assez de nourriture, parce qu’une minorité de personnes dans les pays riches veulent que leurs repas soient ce qu'ils considèrent comme naturel.

 

[…] Norman Borlaug est mort maintenant, mais je pense que nous honorons sa mémoire et sa vision lorsque nous refusons de céder aux orthodoxies politiquement correctes quand on sait qu'elles sont incorrectes. Les enjeux sont élevés. Si nous continuons à nous tromper, les perspectives de vie de milliards de personnes vont être à risque.

 

Donc, je mets au défi chacun d'entre vous aujourd'hui de remettre en question ses croyances dans ce domaine et de voir si elles résistent à un examen rationnel. […]

 

Mais le plus important de tout est que les agriculteurs devraient être libres de choisir quel type de technologies qu'ils souhaitent adopter. Si vous pensez que les anciennes méthodes sont les meilleures, c'est bien. Vous avez ce droit.

 

Ce que vous n'avez pas le droit de faire c’est d’empêcher ceux qui espèrent - ou s’efforce de - faire les choses différemment et mieux. Les agriculteurs qui comprennent les pressions que représentent une population croissante et un réchauffement de la planète. Qui comprennent que les rendements à l'hectare sont le paramètre le plus important de l'environnement. […]

 

Donc, mon message au lobby anti-OGM […] est le suivant. Vous avez droit à votre opinion. Mais vous devez maintenant savoir qu'elle n’est pas validée par la science. Nous arrivons à un point critique, et pour le bien des personnes et de la planète, il est maintenant tempspour vous de ne plus barrer cette voie et de laisser le reste d'entre nous agir pour nourrir la planète de manière durable.

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15 juillet 2012 7 15 /07 /juillet /2012 19:53

New/nouvelle publication                                           drapeau francaisversion française ci-dessous

Destruction of public and governmental experiments of GMO in Europe

Marcel Kuntz. GM Crops & Food, Vol. 3(4), pages 1-7, October/November/December 2012

 

uk-flagThe purpose of this article is to compile the destruction of GMO trials from academic or governmental research institutes in Europe. About 80 acts are identified, mainly in 4 countries; namely France, Germany, the United Kingdom and Switzerland. Examples are also provided for Italy and Belgium.

 

The general conclusions that can be drawn from these destructions are:

 

The vast majority of destroyed academic or governmental experiments were designed to assess the safety of GMOs.

 

Destructions were not limited to field experiments (some confined experiments were also destroyed).

 

cirad2bisDestruction could not be prevented by dialog initiated by scientists.

 

In a few cases, the destruction was accompanied by other damage to property, threats or violence against individuals.

 

Field trial of GMOs is now virtually impossible in many European countries.

 

The EU, national governments and local authorities contribute morally and financially to a major impediment to research on green biotechnology.  

               

                                              Anti-science slogan in the vandalised CIRAD greenhouse

                                            (Let's unmask researchers / let's empty the laboratories)

 

drapeau francaisDestruction des expériences de la recherche publique et  gouvernementale sur les OGM en Europe

Le but de cet article est de compiler les destructions des essais d'OGM de la recherche des Institutions académiques ou gouvernementales en Europe. Environ 80 actes ont été répertoriés, principalement dans 4 pays, la France, l'Allemagne, le Royaume-Uni et la Suisse. Des cas sont aussi décrits en Belgique et en Italie.

 

Les conclusions générales qui peuvent être tirées sont :

 

La grande majorité des destructions concernent des expériences qui visaient à évaluer la sécurité des OGM.

 

Ces destructions ne se sont pas limitées à des essais en champ (des expériences confinées ont également été détruites).

 

Aucune destruction n'a pu être empêchée par des tentatives de dialogue initiées par les scientifiques.

 

Dans un certain nombre de cas, la destruction de l'essai a été accompagnée d'autres dommages à des propriétés, de menaces ou de violence contre des personnes.

 

Les essais au champ sont aujourd'hui quasi impossibles dans certains pays européens.

 

L'UE, certains gouvernements nationaux et certaines autorités territoriales ont contribué, moralement et financièrement, à un obstacle majeur pour la recherche en biotechnologie verte.

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13 décembre 2011 2 13 /12 /décembre /2011 22:33

                                                                                             Read the English version hereuk-flag

EVENEMENT ! Publication de notre article de revue

Assessment of the Health Impact of GM Plant Diets in Long-Term and Multigenerational Animal Feeding Trials: a Literature Review,

par Chelsea Snell, Aude Bernheim,  Jean-Baptiste Bergé,  Marcel Kuntz, Gérard Pascal,  Alain Paris,  Agnes Ricroch,

Food and Chemical Toxicology 50 (2012) 11341148.        Télécharger ici.

 

Le Figaro a été le premier à parler de notre article (lire), suivi de l'AFP (lire).

Interview d'Agnès Ricroch sur Europe 1.

 

Résultats

Contrairement aux allégations souvent entendues, notre article démontre que des études à long terme sur la sécurité sanitaire des OGM ont bien été réalisées (nourrissage d'animaux).

 

Ces études concernent des lignées GM de maïs, pomme de terre, soja, riz et triticale. Elles appartiennent à deux catégories :

12 études toxicologiques de longue durée, c'est-à-dire d'une durée supérieure (jusqu'à 2 ans) aux 90 jours classiquement utilisés dans les tests de toxicité appliqués aux OGM,

12 études sur plusieurs générations d'animaux .

 

Conclusions

Ces études, toutes réalisées par des laboratoires publics, ne révèlent aucun problème sanitaire lié à la consommation à long terme de nourriture dérivée d'OGM.

 

Elles confirment ce qu'ont toujours dit les toxicologues, à savoir que dans les cas où des études de toxicité subchronique sont jugées nécessaires, allonger la durée de nourrissage des animaux au-delà de 90 jours n'apporte aucun élément d'information supplémentaire.

 

En ces temps d’imposture universelle, dire la vérité est un acte révolutionnaire.

                                                                        George Orwell

 

Il ne reste aujourd'hui plus d'espace scientifique pour craindre un risque sanitaire inhérent à la nature « génétiquement modifiée » des variétés commercialisées - après évaluation des risques telle qu'elle est pratiquée.

 

Celle-ci repose sur une méthode comparative avec des variétés reconnues sûres. Elle implique différents niveaux d'examen, du laboratoire jusqu'au champ. L'évaluation réglementaire (selon des normes internationales), et en particulier les études toxicologiques, n'étant que la dernière étape d'un processus « pas-à-pas » et « cas-par-cas ».

 

Des conclusions confortées par des approches différentes

Dans un article scientifique précédent, nous avons passé en revue 44 publications décrivant des profilages à grande échelle d'OGM. Ces nouvelles techniques d'analyses ont pour but de visualiser l'expression de tous les gènes, toutes les protéines et tous les petits composés chimiques (métabolites) dans un organisme donné.

 

-aucune de ces publications ne conclut à un problème de sécurité sanitaire pour les OGM mis sur le marché.

-la transgénèse a moins d'impact sur les plantes que la variabilité génétique générée par l'amélioration conventionnelle des plantes dans les variétés déjà existantes.

-les changements naturels de l'environnement (d'un champ à l'autre par exemple) ont généralement un impact plus prononcé sur les plantes que la transgénèse.

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13 décembre 2011 2 13 /12 /décembre /2011 22:07

                                                                                   drapeau francaisLire la version française en cliquant ici

NEW ! Our review article is published

Assessment of the Health Impact of GM Plant Diets in Long-Term and Multigenerational Animal Feeding Trials: a Literature Review,

by Chelsea Snell, Aude Bernheim,  Jean-Baptiste Bergé,  Marcel Kuntz, Gérard Pascal,  Alain Paris,  Agnes Ricroch,

Food and Chemical Toxicology.     Download here.

 

Results

Contrary to frequently heard allegations, our article shows that long term animal feeding studies examining food safety of GMOs have actually been performed. 

 

These studies concern GM lines of maize, potato, soybean, rice and triticale and are of two types:

12 long term toxicological studies, where feeding time exceeds well over (up to 2 years) that of the 90 day studies classically used in toxicological studies applied to GMOs,

12 studies whose duration extended over several generations of animals.

 

Conclusions 

These studies by public research laboratories do not reveal any safety problem linked to long term consumption of GMO-derived food.

 

They confirm what has always been said by toxicologists, namely that if long term subchronic toxicity tests are considered to be necessary, increasing animal feeding duration beyond 90 days does not provide any additional information.


 

During times of universal deceit, telling the truth becomes a revolutionary act.

                                                                George Orwell

 

Today there is no scientific space left for fear about a food safety risk inherently linked to the « genetically modified » nature of varieties marketed after the currently performed risk assessment.

 

GM risk assessment is based on a comparative method with conventional varieties recognized as safe. It involves several levels of examination, from the laboratory to the field. The reglementary assessment (according to international standards), and in particular the toxicological studies, being only the last step of a step-by-step and case-by-case process.

 

These conclusions are confirmed by different approaches

In a previous scientific article, we surveyed 44 publications on large scale profiling of GMOs. These novel analytical techniques aim to visualize the expression of all genes, all proteins and all small chemical compounds (metabolites) in a given organism.  

 

-none of these publications concluded to a health hazard linked to marketed GMO food.  

-transgenic plant breeding has less impact on plants than the genetic variation generated in existing varieties by conventional breeding.

-natural environmental changes (between two distant fields, for example) usually have a larger impact on plants than transgenesis.  

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15 juin 2011 3 15 /06 /juin /2011 20:14

Parution de l’ouvrage édité chez Vuibert avec une préface d'Axel Kahn et une postface de François Houllier, sous la direction d'Agnès Ricroch et coll.
40 auteurs ont contribué aux 22 chapitres regroupés en 5 parties. Communiqué de presse.

 

CouvTable des matières

 

Avant-propos.

Préface. Une contribution à un débat rationnel et informé sur les biotechnologies végétales (Axel Kahn).

 

Première partie. L’amélioration des plantes : le contexte

L’amélioration des plantes : de la domestication à la transgénèse (André Gallais).

 

Les complexes d’espèces et les flux de gènes entre les espèces sauvages et cultivées (Agnès Ricroch, Thierry Robert, Yann Dussert, Ghayas Lakis & Claude Foury).

 

Les ressources génétiques et la diversité génétique des variétés végétales cultivées (Alain Deshayes et Yvette Dattée).

 

Comment protéger les innovations végétales (Bernard Le Buanec et Agnès Ricroch).

 

Deuxième partie. Méthodes et outils

Les biotechnologies de culture in vitro en amélioration des plantes (Évelyne Téoulé).

 

La transgénèse végétale (Georges Pelletier).

 

Le métabolome (Alain Paris).

 

La protéomique des plantes (Norbert Rolland et Marcel Kuntz).

 

Techniques d’analyse de la structure et du fonctionnement des génomes de plantes (Michel Delseny et Michel Caboche) .

 

Cartographie de QTL, génétique d’association et applications en sélection (Alain Charcosset et Laurence Moreau) .

 

Troisième partie. Agriculture et environnement

La gestion de la durabilité des PGM résistantes à certains insectes (Jean-Baptiste Bergé et Agnès Ricroch).

 

Les cultures tolérantes à certains herbicides : adoption, impacts et développement d’adventices résistantes (Sylvie Bonny).

 

Les PGM résistantes aux maladies virales et cryptogamiques (Marc Fuchs).

 

Des plantes transgéniques pour une meilleure utilisation de l’azote

(Bertrand Hirel et André Gallais).

 

L’apport des biotechnologies pour l’amélioration de la tolérance à la sécheresse des céréales (Laure Gaufichon, Bernard Bachelier, Jean-Louis Prioul).

 

L’apport des biotechnologies végétales aux pays en développement (Mame-Oureye Sy et Claudine Franche).

 

Quatrième partie. Alimentation et santé

L’intérêt des plantes génétiquement modifiées (PGM) pour la qualité des productions agricoles : le maïs Bt (Catherine Regnault-Roger et Marc Délos).

 

La qualité des produits : des innovations quantitatives et qualitatives apportées par les biotechnologies (Pierre Barret et Gérard Pascal).

 

La production de protéines biosynthétiques à usage thérapeutique

(Louis-Marie Houdebine et Marc-André D’Aoust) .

 

Cinquième partie. Perspectives

Quel peut être l’apport des biotechnologies végétales à l’agriculture durable des pays en développement ? (Michel Griffon).

 

Les biotechnologies végétales à l’horizon 2030 (David B. Sawaya).

 

Conclusion (Marc Fellous et Yvette Dattée) .  Postface (François Houllier).    Bibliographie.


Supplément : La gestion de la durabilité des PGM résistantes à certains insectes (Jean-Baptiste Bergé et Agnès Ricroch).

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